Il faut dire que les biopics (biographic pictures) sont de plus en plus courus. Un genre prolifique qui ne devrait pas disparaître de sitôt puisque des dizaines de projets sont en préparation (Kurt Cobain, James Brown, Arletty, John Lennon ou encore Romy Schneider). Mais pourquoi ce genre rencontre-t-il un tel succès auprès des producteurs et des spectateurs ?

Si les biopics semblent se multiplier ces derniers temps, ce serait une erreur de croire qu'il ne s'agit que d'une mode récente. De tous temps les cinéastes se sont intéresses à la vie de nos illustres concitoyens, d'Emile Zola à Che Guevara en passant par Van Gogh et Marie-Antoinette... et ce sur tous les continents.

Des biopics d'un nouveau genre

Autrefois cantonnées aux téléfilms du samedi soir, les personnalités du sport, de la politique, des sciences ou de la culture connaissent aujourd'hui les faveurs des salles obscures. Un passage sur grand écran qui demande de s'éloigner de la biographie très scolaire souvent illustrée à la télévision.

Signés par des cinéastes au style inimitable (Tim Burton pour "Ed Wood") ou engagés (Spike Lee avec le percutant "Malcom X"), les biopics de « prestige » n'ont plus rien à voir avec leurs petits frères de télévision, d'autant plus que ces films sont souvent synonymes de récompenses pour leurs interprètes. Il n'y a pas que Marion Cotillard qui ait été couverte de prix. Ne seraient-ce ces dix dernières années, la moitié des Oscars ont été attribués à des acteurs ayant incarnés des personnages réels, illustres (Nicole Kidman/Virginia Woolf, Jamie Foxx/Ray Charles, Reese Witherspoon/June Carter, Philip Seymour Hoffman/Truman Capote, Forest Whitaker/Idi Amin Dada, Helen Mirren/Elizabeth II, Sean Penn/Harvey Milk) ou méconnus (Julia Roberts/Erin Brockovich, Charlize Theron/Aileen Wuornos, Adrien Brody/Wladyslaw Szpilman...)

La différence réside peut-être dans l'intérêt grandissant pour les personnalités du show-business, acteurs, réalisateurs ("Chaplin" de Richard Attenborough), chanteurs (Bob Dylan dans "I'm not there, Johnny Cash dans "Walk The Line") et même rappeurs (50 Cent et Eminen se sont tous deux illustrés dans des long-métrages plus ou moins inspirés de leur propre vie).

Un pari risqué

Mais encore faut-il choisir judicieusement la personnalité. Un mauvais timing, un choix maladroit... et c'est la débandade. Cécile de France en a fait l'amère expérience l'an passé avec un projet qui lui tenait à cœur, une adaptation de la vie de "Sœur Sourire". Malgré la popularité du tube interplanétaire « Dominique », le film n'a pas rencontré son public, n'attirant que 80 000 spectateurs dans les salles françaises.

S'attaquer à un monument de l'histoire ou à une star immensément populaire peut s'avérer particulièrement périlleux, plus encore lorsque la personnalité est ancrée dans notre inconscient collectif et appartient à notre passé récent. A ce titre-là, Joann Sfar n'a pas choisi la facilité en choisissant de se pencher sur la vie tourmentée de l'homme à la tête de choux, d'autant plus qu'à l'exception de Gainsbourg, tous les membres de son entourage, sa famille, ses conquêtes féminines, sont encore parmi nous.

Le récent "Invictus" de Clint Eastwood le prouve une fois encore à travers un épisode de la vie du leader sud-africain Nelson Mandela. Quoique qu'Invictus n'est pas exactement ce que l'on pourrait qualifier un biopic, le scénario se focalisant sur une partie bien déterminée de la vie de Nelson Mandela. Un angle particulier qui s'éloigne de la biographie à proprement parler. Nonobstant, malgré la brièveté de la période couverte, ces « minis-biopics » cernent souvent avec plus de justesse la personnalité de la célébrité.

Antoine de Caunes avait ainsi choisi de situer son Coluche à l'époque de sa candidature aux élections présidentielles de 1981, un choix hasardeux pour le comique qui bouleversa à jamais sa vie personnelle et professionnelle. Malheureusement, malgré l'immense popularité de Coluche et la saisissante interprétation de François-Xavier Demaison, celui-ci n'a pas rencontré son public. La faute à une réalisation trop sage en comparaison de la personnalité brute de décoffrage du comique.

Manque criant d'inspiration ? Voilà une critique souvent reprochée aux producteurs de cinéma accusés de choisir la voie facile en adaptant des histoires déjà bien connues, qu'il s'agisse de livres, de BD, de suites, de remakes, de séries télé ou de faits réels. Nous ne sommes sans doute pas loin de la vérité. Mais les producteurs ne s'engageraient pas sur de tels projets si le grand public n'était pas demandeur, ne serait-ce que pour s'amuser à jouer au jeu des 7 erreurs entre la réalité et sa version sur pellicule. Parfois à la limite du voyeurisme, l'attrait des spectateurs pour les biopics démontre que ces derniers aiment plus que jamais se sentir en terrain connu.

 

Marion Batellier,  publié le 25 janvier 2010 sur http://suite101.fr